mercredi 28 octobre 2009

John Mc Crae - Dans les plaines des Flandres

Dans les plaines des Flandres poussent les coquelicots
Au milieu des croix, rang après rang, fanaux
Qui indiquent nos postes, alors que dans le ciel
Les alouettes, chantant bravement, s’envolent
Inaudibles rumeurs, dans l’écho des canons

Nous sommes les cadavres, il y a quelques jours
Nous étions là, petits matins, dans le couchant
Nous aimions, étions aimés, et maintenant
Nous sommes morts,
Dans les plaines des Flandres.

Notre combat, nos ennemis, nous vous léguons
Recevez les, d‘une main lasse nous tendons
Ce flambeau, puisssiez vous le défendre
Si vous nous trahissez, qui mourons,
Jamais plus nous ne pourrons
Reposer, quand poussent les coquelicots
Dans les plaines des Flandres


In Flanders fields the poppies blow
Between the crosses, row on row,
That mark our place; and in the sky
The larks, still bravely singing, fly
Scarce heard amid the guns below.

We are the dead. Short days ago
We lived, felt dawn, saw sunset glow,
Loved, and were loved, and now we lie
In Flanders fields.

Take up our quarrel with the foe:
To you from failing hands we throw
The torch; be yours to hold it high.
If ye break faith with us who die
We shall not sleep, though poppies grow
In Flanders fields.

Yu Jian - A une poétesse

致一位诗人

多年以后
我们面对面
坐在一个房间
开始点烟
你的声音已经生锈
斑斑驳驳落在地上
却渴望被我拾起
再获得青铜的光泽
我沉默不语
无话找话 是一件很痛苦的事情
那一日已经远去
我不知道你的电话号码
那一日我曾经失眠
那那生命中少有的时刻
如果沿着那一日走近你
我们会相处一生

世界已建筑得如此坚固
让我们彬彬有礼地告辞吧
回到各自的房间
像墙壁那样 彼此站立
这样要习惯得多


A une poètesse

Longtemps après
Nous nous sommes revus
Assis dans cette chambre
Cigarettes allumées
Ta voix déjà éraillée
Sur le sol éparpillée
Avide d’être ramassée
Reprise, dans la lumière cuivrée
Mais je n’ai rien dit
Silence contre parole, c’est terrible
Ce jour là, je suis parti
Oublié ton numéro
Ce jour là j’ai perdu le sommeil
Et tous ces moments rares
Si j’étais resté, ce jour là, près de toi
C’aurait été pour toute la vie

Le monde a bâti tant de murs
Poliment se dire adieu
Rentrer chacun dans sa chambre
En voisins, de part et d’autre
Par habitude

samedi 10 octobre 2009

Su Shi - Combien de fois sous la lune

Combien de fois sous la lune,
Une coupe à la main j’interrogeai le firmament
Ne sachant pas, dans les palais célestes, quelle année on était
Je voulais partir à cheval sur le vent, mais j’avais peur,
Des pavillons d’or, des maisons de jade
Du froid glacial de ces hauts lieux,
De ces ombres qui dansent, inhumaines

Tourné vers ce palais, vers ses belles fenêtres,
Qui illuminent mon éveil
Insensibles, parfois grandes, parfois rondes
L’homme est joyeux et triste, seul et aimé,
La lune est sombre et claire, ronde et voilée
Rien ne s’accomplit jamais
Si seulement la vie était longue
A mille lieues, avec Phoebé


明月幾時有 把酒問青天
不知天上宮闕 今夕是何年

我欲乘風歸去 唯恐瓊樓玉宇
高處不勝寒 起舞弄清影 何似在人間

轉朱閣低綺戶照無眠
不應有恨何事長向別時圓
人有悲歡離合 月有陰晴圓缺
此事古難全 但願人長久
千里共嬋娟

vendredi 9 octobre 2009

WH Auden - Musée des Beaux Arts

Musée des Beaux Arts

En matière de souffrance, ils n’avaient jamais tort,
Les Vieux Maîtres, ils connaissaient trop bien
Son caractère humain, comme elle se produit
Pendant que quelqu’un mange, ou ouvre une fenêtre, ou seulement se promène
Comme, quand les anciens recueillis, passionnés, attendent
La naissance miraculeuse, il y a toujours
Des enfants qui n’en ont pas spécialement envie, et qui patinent
Sur un étang, à l’orée d’un bois
Ils n’oubliaient jamais
Que même le terrible martyr s’accomplit
Pendant que dans un coin, un endroit sale
Les chiens vivent leur vie de chien, et le cheval du bourreau
Frotte son innocent derrière contre un arbre
Dans l’Icare de Breughel, par exemple : comme chaque chose fuit
Joyeusement, le désastre. Le laboureur a peut être
Entendu le choc, le cri de désespoir
Mais ce n’est pas, pour lui, une catastrophe, le soleil brillait
Comme il devait, jambes blanches s’enfonçant dans l’eau
Verte ; et la riche et délicate nef, qui a dû voir
Un prodige, un garçon tombant du ciel
Avait un port à rallier, et voguait tranquillement

Musee des Beaux Arts

About suffering they were never wrong,
The Old Masters; how well, they understood
Its human position; how it takes place
While someone else is eating or opening a window or just walking dully along;
How, when the aged are reverently, passionately waiting
For the miraculous birth, there always must be
Children who did not specially want it to happen, skating
On a pond at the edge of the wood:
They never forgot
That even the dreadful martyrdom must run its course
Anyhow in a corner, some untidy spot
Where the dogs go on with their doggy life and the torturer's horse
Scratches its innocent behind on a tree.
In Breughel's Icarus, for instance: how everything turns away
Quite leisurely from the disaster; the ploughman may
Have heard the splash, the forsaken cry,
But for him it was not an important failure; the sun shone
As it had to on the white legs disappearing into the green
Water; and the expensive delicate ship that must have seen
Something amazing, a boy falling out of the sky,
had somewhere to get to and sailed calmly on.

dimanche 4 octobre 2009

WH Auden - Foxtrot

Foxtrot

Le soldat aime son fusil
Le savant aime ses livres
Le fermier aime ses chevaux
L’actrice aime ses sourires
L’amour est partout en ce monde
Où que l’on puisse aller
Certains perdent la tête pour la jolie Mae West
Mais tu es ma tasse de thé

On parle d’Alexandre
Ou bien de Fred Astaire
On veut ses héros chevelus
Ou alors débonnaires
Certains aiment les aides de camps
Et d’autres les curés
Certains aiment les brutes qui les maltraitent
Mais tu es ma tasse de thé

Il y a des fous de fox terriers
Des dingues de pékinois
De chats de gouttières, de perroquets
De cochons d’inde et même d’oies
Il y a des malades dans les asiles
Qui se prennent pour des marronniers
J’ai eu une vieille tante qui adorait une plante
Mais tu es ma tasse de thé

Il y a des ventres qui pendent
Et des nez épatés
Il y a des orteils en rateau
Et des rates dilatées
Il y a la crampe de l’écrivain
La maladie de la lavandière
Il y a aussi des choses qui ne sentent pas la rose
Mais tu es ma tasse de thé

Le merle aime le ver
La vipère le soleil
L’ours polaire aime son iceberg
L’éléphant son pâté
La truite aime sa rivière
La baleine sa mer
Et les chiens préfèrent les vieux réverbères
Mais tu es ma tasse de thé

FOXTROT FROM A PLAY

The soldier loves his rifle,
The scholar loves his books,
The farmer loves his horses,
The film star loves her looks.
There’s love the whole world over
Wherever you may be;
Some lose their rest for gay Mae West,
But you’re my cup of tea.

Some talk of Alexander
And some of Fred Astaire,
Some like their heroes hairy
Some like them debonair,
Some prefer a curate
And some an A.D.C.,
Some like a tough to treat’em rough,
But you’re my cup of tea.

Some are mad on Airedales
And some on Pekinese,
On tabby cats or parrots
Or guinea pigs or geese.
There are patients in asylums
Who think that they’re a tree;
I had an aunt who loved a plant,
But you’re my cup of tea.

Some have sagging waistlines
And some a bulbous nose
And some a floating kidney
And some have hammer toes,
Some have tennis elbow
And some have housemaid’s knee,
And some I know have got B.O.,
But you’re my cup of tea.

The blackbird loves the earthworm,
The adder loves the sun,
The polar bear an iceberg,
The elephant a bun,
The trout enjoys the river,
The whale enjoys the sea,
And dogs love most an old lamp-post,
But you’re my cup of tea.